Au décours d'une virée entre filles , j'ai rencontré par hasard une ancienne collègue aujourd'hui retraitée depuis plus de vingt ans : ironie du sort, cette sage femme m'avait guidée lors de ma toute première journée dans notre établissement , et bien des années plus tard , il se trouve que nous formions équipe lors de SA dernière garde .
Comme elle a beaucoup de savoir- vivre et bien qu'elle n'y connaisse désormais plus grand monde , elle ne manque pas à chaque occasion de me demander des nouvelles de la maternité . On refait ainsi le tour des jeunes , des moins jeunes et on s'éternise sur le bon ( ?) vieux temps. Incontournablement, nous ne pouvons nous empêcher d'évoquer cette dernière garde de nuit qui avait été si longue et si éprouvante. Dans la cour de l'hôpital , une partie de l'équipe attendait mon signal pour monter dans le service afin de partager le traditionnel " pot surprise" .Malheureusement cette nuit là , le sort en avait décidé autrement puisqu'au bloc opératoire se jouait le sort d'une patiente qu'on essayait d'arracher à la mort à grand coups de culots globulaires, PFC et concentrés plaquettaires. L'équipe avait travaillé d'arrache-pied et la jeune femme avait survécu, malheureusement sans son utérus.
Quand nous nous sommes retrouvées seules, MaSouricette m'a naïvement demandé si ces situations n'étaient pas déstabilisantes pour nous les soignants....
Oups .....comment dire ma fille ?
Du haut de ta jeunesse, il t'est facile de comprendre des sentiments tels que le bonheur , la fougue ou la passion. Alors comment te parler de ces heures d'agitation et de désarroi ? Comment te parler de la trouille, de la fatigue et puis parfois des larmes ? Comment t'expliquer que dans notre métier chaque jour nous apporte son lot de surprises, petites peines, gros stress ou immenses bonheurs ?
Cet après-midi là , par faiblesse ou par pudeur , je ne t'ai pas répondu.
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