C'est une nuit rare, insaisissable , voire même totalement improbable ! A trois heures du matin tout est plié, la dernière accouchée est remontée dans sa chambre , les dossiers achevés, le bureau trop bien rangé. Dans ma maternité, nous n'avons pas de chambre de garde . Pour tout ce qui a trait au repos , notre hiérarchie nous a carrément fait savoir qu'on était pas là pour " ça " !!
Par conséquent , les rares fois où c'est possible, quand on décide de " sortir les fauteuils" mettons nous bien d'accord , il ne s'agit pas de Pullmann ! Ce sont d’antiques banquettes habituellement dévolues aux futurs pères en salle de naissance ,qui nous permettent de reposer quelques instants nos cerveaux embués par les limbes de la nuit .
On installe le campement : fauteuil pour le corps, tabouret pour les pieds et puis parfois un drap . Tout ça sans oublier de positionner le téléphone pas trop loin . De mémoire,je pense n’avoir jamais réussi à m’endormir en garde : j’ai les cervicales en accordéon et les lombaires dans le vide , ça n’aide pas à la relaxation . Et puis avec la lumière du couloir qui agresse mes yeux et me maintient en alerte , je repense toujours à Michel Serrault dans "Garde à vue " ou à Yves Montand dans " L’aveu " . J’aime pas cette sensation à mi-chemin entre gueule de bois , torpeur et hébétude.
Mon esprit ne débranche jamais : lamentablement, il erre entre rêve et réalité et surgissent alors des thèmes hautement existentiels limite délirants :
- Quel temps fera-t-il demain?
- Ne pas oublier l'argent de poche des Souriceaux ni le cadeau d'anniversaire de Monsieursagesouris.
- Et si on prenait une année sabbatique pour faire le tour du monde ... A nous les steppes du Kasahksan, la Californie ou bien encore Pretoria. Déjà retentit ce que je pensais être le bruit des machines à sous à Las Végas , et qui s'avère n'être malheureusement qu'une banale sonnerie de téléphone nous prévenant de la prochaine admission .
Allez , hop, debout ! on est pas là pour rêver !
Je dédie humblement ce billet aux membres de mon entourage qui ne comprennent toujours pas pourquoi je déteste le camping !